Clauses statutaires d’exclusion en SAS : une procédure conforme à la Constitution

Dans un contentieux relatif à la procédure d’exclusion prévue par les statuts d’une SAS, deux précisions utiles sont apportées dans le sillage des modifications introduites par la loi Soilihi n° 2019-744 du 19 juillet 2019.

En matière de sociétés par actions simplifiées, une série de décisions ont récemment apporté deux éclairages importants sur la nouvelle rédaction de l’article L. 227-19 du Code de commerce résultant de la loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 (dite loi de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés). En effet, le texte prévoit désormais qu’une clause statutaire prévoyant, conformément à l'article L. 227-16 du Code de commerce, qu'un associé peut être tenu de céder ses actions, peut être adoptée (ou modifiée) par une décision prise collectivement par les associés dans les conditions et formes prévues par les statuts, et non plus à l’unanimité des associés.

Début octobre, la Cour de cassation avait jugé sérieuses et accepté le renvoi devant le Conseil constitutionnel de quatre questions prioritaires de constitutionnalité sur la conformité des deux articles du Code de commerce aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, relatifs au droit de propriété (Cass. Com, 12 oct. 2022, n° 22-40.013).

Précision utile, dans son arrêt, la Cour de cassation en a profité pour énoncer que les dispositions supprimant « l'exigence d'unanimité pour l'adoption ou la modification d'une clause statutaire d'exclusion dans les sociétés par actions simplifiées, ont pour objet et pour effet de régir les effets légaux du contrat de société » pour juger qu’elles étaient applicables aux sociétés par actions simplifiées créées antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019.

Deux mois plus tard, le Conseil constitutionnel a finalement déclaré la procédure d’exclusion prévue par les statuts d’une SAS en application des articles L. 227-16 et L. 227-19 du Code de commerce conforme aux articles 2 et 17 de la Constitution, qui prévoient respectivement que les atteintes au droit de propriété doivent être justifiée par un motif d’intérêt général et être proportionnées à l’objectif suivi et que la propriété est « un droit inviolable » » (décision QPC n° 2022-1029, 9 déc. 2022).

Pour considérer que les dispositions contestées ne portaient pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété, une justification en cinq temps est apportée :

  1. l'exclusion de l'associé, qui constitue une cession forcée, n'entraîne pas une privation de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789 ;

  2. la clause d'exclusion contribue à garantir la cohésion de l'actionnariat et assurer ainsi la poursuite de l’activité. En prévoyant que l’adoption ou la modification d’une clause d’exclusion puisse être décidée sans recueillir l’unanimité des associés, il a également entendu éviter les situations de blocage pouvant résulter de l’opposition de l’associé concerné à une telle clause, et poursuit donc un objectif d'intérêt général ;

  3. il est de jurisprudence constante qu’une décision d’exclusion résulte d’une procédure prévue par les statuts. « Elle doit reposer sur un motif, stipulé par ces statuts, conforme à l'intérêt social et à l'ordre public, et ne pas être abusive » ;

  4. l’exclusion implique le rachat des actions de l’associé à un prix fixé, selon l'article L. 227-18 du Code de commerce, en application des modalités prévues par les statuts de la société  ou, « à défaut, soit par un accord entre les parties, soit par un expert désigné dans les conditions prévues à l'article 1843-4 du Code civil » ;

  5. la décision d'exclusion, ou le prix de cession de ses actions peuvent être contestés. Le juge doit alors « s'assurer de la réalité et de la gravité du motif retenu ».

Prochaines étapes

Si vous souhaitez discuter plus en détail de ces mises à jour et de leur impact sur les transactions et les structurations de sociétés, n'hésitez pas à prendre contact avec un membre de notre équipe Corporate & Finance à Paris.

 

 

Authored by Xavier Doumen and Louis-Nicolas Ricard.

 

This website is operated by Hogan Lovells International LLP, whose registered office is at Atlantic House, Holborn Viaduct, London, EC1A 2FG. For further details of Hogan Lovells International LLP and the international legal practice that comprises Hogan Lovells International LLP, Hogan Lovells US LLP and their affiliated businesses ("Hogan Lovells"), please see our Legal Notices page. © 2024 Hogan Lovells.

Attorney advertising. Prior results do not guarantee a similar outcome.