Droit social : l'actualité de la semaine, 02 avril 2021

Licenciement pour harcèlement moral et licéité de l’enquête menée par un cabinet d’audit externe en l’absence d’information du salarié concerné

Suite à des dénonciations de faits de harcèlement moral, un employeur avait saisi un cabinet d’audit externe, spécialisé dans les risques psycho-sociaux qui, après enquête, confirme l’existence d’agissements de harcèlement moral commis dans l’entreprise. Sur cette base, l’employeur licencie la salariée, auteur des faits, pour faute grave. 

La Cour d’appel de Paris écarte des débats le compte rendu de l’enquête, pièce cruciale pour faire la démonstration de la faute grave, au motif que la salariée auteur des faits n’a pas été préalablement informée de la tenue de l’enquête et qu’elle n’a pas non plus eu l’opportunité de s’exprimer dans ce cadre. La Cour fonde sa motivation sur le principe de loyauté dans l’administration de la preuve à l’aune de l’article L.1222-4 du Code du travail.

Par un arrêt du 17 mars 2021 (n°18-25.597), la Cour de cassation adopte une position inverse et précise que l’enquête diligentée après la dénonciation de faits de harcèlement n’est pas soumise au principe de loyauté dans l’administration de la preuve comme issue d’un procédé de surveillance clandestin ; une solution qui peut se justifier par l’obligation faite à l’employeur de prévenir les agissements de harcèlement moral et de les faire cesser dès qu’il en a connaissance. 

Notons que, dans cette affaire, les représentants du personnel semblent avoir été étroitement associés à l’organisation de l’audit diligenté.

Inaptitude : des précisions intéressantes de la Cour de cassation

  • Préconisation de mesures d’aménagement entraînant une modification du contrat de travail : il ne s’agit pas nécessairement d’un avis d’inaptitude

Une salariée, employée en tant que changeur traiteur de monnaie dans un casino, est déclarée inapte à son poste. Le médecin du travail émet un avis d’inaptitude mais préconise néanmoins une contre-indication « à tout travail de nuit après 22 heures » et la « possibilité d’occuper tout autre poste respectant cette contre-indication ». 

Cet avis d’inaptitude ambiguë est contesté par la salariée devant le Conseil de prud’hommes en la forme des référés, puis devant la Cour d’appel qui substitue à l’avis du médecin du travail un avis d’aptitude au poste occupé par l’intéressée, avec réserves concernant le travail de nuit effectué après 22 heures.

Dans un arrêt du 24 mars 2021 (n°19-16.558) , la Cour de cassation approuve cette décision: ce n’est que s’il constate, après avoir procédé ou fait procéder à une étude de poste et avoir échangé avec le salarié et l’employeur, qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé de santé du travailleur justifie un changement de poste, que le médecin du travail déclare le travailleur inapte à son poste. Le fait que les mesures d’aménagement préconisés entraînent une modification du contrat de travail du salarié n’implique donc pas, en soi, la formulation d’un avis d’inaptitude.

Cette affaire rappelle la nécessité, en cas de difficulté d’interprétation d’un avis du médecin du travail, de faire clarifier sa position par ce dernier et, si nécessaire, de saisir le conseil de prud’hommes en contestation de l’avis émis.

  • Pas d’obligation d’information du salarié lorsqu’un poste de reclassement a été proposé au salarié inapte

Conformément aux articles L.1226-2-1 et L.1226-12 du Code du travail, lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi à un salarié inapte, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. 

Dans une décision du 24 mars 2021 (n°19-21.263), la Cour de cassation juge que l’employeur n’est pas tenu à cette obligation lorsqu’il a proposé au salarié, qui l’a refusé, un poste de reclassement conforme aux exigences légales.

Dans cette affaire, le salarié, qui avait sollicité des dommages-intérêts pour absence d’information sur les motifs de l’impossibilité de reclassement, n’obtient donc pas de gain de cause, ayant décliné les offres de reclassement, conformes aux textes applicables et validées par le médecin du travail, proposées par son employeur.

 

Auteurs Alexandra Tuil et Hélène de Nazelle 

Keywords Droit social
Languages Français
Topics Employment
Countries France

 

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